Mauguio – Dimanche 10 juin
Toros de Aimé Gallon et Fils pour
Javier Conde : silence après un avis, silence et deux oreilles et la queue symbolique
Román Pérez : deux oreilles, silence et deux oreilles
Le 5e de la tarde, du fer de Gallon, nommé "Opulento" est gracié par Javier Conde.
Reseña de Patrick Colleoni - Torobravo
Mauguio accueillait hier dans le cadre de sa Romeria annuelle un mano a mano entre le matador malagueño Javier Conde et le français Roman Perez. Les toros choisis pour arbitrer les débats portaient le fer des frères Gallon.
Côté bétail, les bichos du jour, tous anovillados mais bien armés (les pointes ne souffrirent pas lorsqu’ils rématèrent souvent fort dans les planches), affichèrent un bon fond de caste malgré une pointe de faiblesse qui fit qu’ils furent relativement épargnés au premier tiers. Les troisième et quatrième reçurent deux châtiments. Dans la muleta, tous furent exploitables à des degrés divers, les 2°, 5° et 6° au-dessus du lot.
Un lot de toros conforme à la catégorie de la plaza, bien que personnellement j’eus aimé que le trapio des cornus soit plus conséquent (les poids affichés m’ont paru bien optimistes). Mais Javier Conde n’allait pas venir à Mauguio prendre des risques…
Côté spectacle, les présents ne se sont pas ennuyés, même si la première partie, à part la lidia du second, se traîna un peu. Cette corrida aura eu au moins le mérite de maintenir la tradition taurine aux portes de Montpellier, et peut-être de faire revenir aux arènes les néophytes présents dans les gradins. C’est déjà pas si mal.
Face au premier, Javier Conde nous servit trois véroniques et la demie « maison » avant de mener son opposant vers le lancier pour une pique trasera repositionnée. Au second tiers, le Gallon perdit un onglon de la patte avant gauche, mais il poursuivit néanmoins son combat. Le malegueño se montra tout aussi élégant que prudent face à ce bicho qui donna le meilleur sur la corne droite, la gauche s’avérant moins fréquentable. Quelques détails aux arômes andalous émaillèrent cette entrée en matière qui ne restera pas pour autant dans les annales. Cinq pinchazos en prenant les boulevards extérieurs, puis un tiers de lame de travers pour mettre fin au trasteo. Silence.
Le troisième ne plut pas à Javier Conde qui lui proposa d’entrée trois véroniques au ralenti avant deux rations de fer d’inégale intensité. Après quelques muletazos ambidextres sur le voyage, le malagueño choisit de mettre fin au débat. Pinchazo, puis demi-lame toujours en prenant les extérieurs, deux descabellos. Silence.
On pensa que la messe était dite quand Javier Conde ne laissa qu’une véronique propre lors de la réception du quinto. Après un unique puyazo (bien administré par Mathias Forestier), l’andalou vit tout le potentiel du Gallon. Après avoir brindé l’animal à son ami Ali venu de Zaragoza, l’andalou commença d’entrée par baisser la main, signant quelques séries de derechazos de bon son agrémentées d’esthétiques changements de main. Le public, vite conquis, suivit avec ferveur le torero qui passa sur le piton gauche pour des séries encore plus abouties, le temple et la lenteur au rendez-vous de l’art. Partie du callejon, la pétition d’indulto commença alors à se propager, Conde jouant à fond le jeu, prolongeant à l’envi ses séries de naturelles, bien aidé en cela par un bicho d’une grande noblesse qui ne lui refusa rien et chargea avec beaucoup d’entrega. Sous la pression populaire, le palco sortit le mouchoir orange.
Après un simulacre d’estocade, le Gallon regagna les chiqueros et la prestation de Javier Conde fut créditée des trophées maxima symboliques. Une situation qui a dû bien arranger le torero qui la veille à Ubrique avait pinché un succès à cause du mauvais usage des aciers. Pas fou l’animal !
Quant à l’indulto, si l’on s’en tient aux critères qui devraient être en usage dans toutes les plazas de toros, évidemment (et comme souvent) il n’y est pas, car la noblesse à elle seule ne suffit pas. Il faut que la bravoure s’exprime avec force en plusieurs assauts sur la cavalerie. Par les temps qui courent, trop de toros nobles regagnent le campo en ayant été inédits lors du premier tiers. Le sujet fait, et fera toujours, débat…
Roman Perez, dans un autre registre, est un garçon qui sait toréer et qui le prouve lorsqu’il en a l’occasion, même si hier sa stature dévaluait un peu ses combats face à des adversaires qui lui arrivaient à peine à la ceinture. Face au bon second, il dessina quelques bonnes véroniques et chicuelinas en ouverture, rématant par esthétique revolera. Après une pique rectifiée, le français signa un quite par véroniques et demie avant de se lancer dans une faena ambidextre de bonne facture (brindée à Thomas Cerqueira et au docteur Nègre qui l’an dernier dans ces mêmes arènes avait sauvé la vie au premier cité), et dessinée à mi-hauteur pour ne pas compromettre l’équilibre un peu fragile du toro. Grosse entière en place après final encimista et deux oreilles pour Roman. Vuelta généreuse pour le bicho.
Face au quatrième, entrée en matière par véroniques et demies, puis après deux rations de fer, un quite par navarras. Bien doublé en début de faena, le bicho baissa de régime en cours de lidia et l’intensité du trasteo s’en ressentit, les meilleures tandas venant sur la corne droite avant que le soufflé retombe. Le Gallon termina en envoyant la corne à chaque sortie de passe, et la faena s’orienta vers un style publerino. Demi-lame delantera latérale, deux descabellos. Silence.
Face au sixième, Roman éleva le niveau de sa précédente prestation. Bonnes véroniques et demie en ouverture, puis après unique ration de fer, une faena où le garçon s’étira au maximum sur les deux bords lors de longs muletazos templés, un désarmé cassant un peu le rythme avant le final. Nouvelle entière en place et deux autres oreilles dans l’escarcelle de Romain.
Sortie a hombros des deux toreros du jour en compagnie des ganaderos. Souhaitons que le succès de l’édition 2018 amène plus de monde sur les gradins l’an prochain (un peu moins d’une demi-entrée cette année). La Fiesta en a besoin !
Une minute de silence fut observée à l’issue du paseillo en mémoire de Luc Jalabert.
Quelques antis exprimaient leur opposition sur un rond-point à l’entrée de la ville, loin des arènes.
Reseña et photos : Patrick Colleoni.