Le 30 décembre 2011, Mathieu Picart « Mateo Julian » annonçait qu’il mettait un terme à sa jeune carrière de novillero. Pour rappel Mateo Julian avait débuté en public le 23 septembre 2007 à Générac à l'occasion des demi-finales de Graine de Torero coupant 2 oreilles à son adversaire. Il se présentera ensuite en Novillada Piqué le 1er mai 2011 à Aire sur l’Adour face à des novillos de Los Galos et avait toréé seulement une seconde novillada à Istres.
Bonjour Mateo Julian, premièrement pouvez vous vous présenter et nous parler un peu de votre aficion ?
Bonjour à tous. Je m’appelle Mathieu Picart allias Mateo Julian. Je suis né dans une petite ville appelée Oyonnax située dans l’Ain (01). J’ai 24 ans et je vie actuellement sur Arles. Ma passion pour les toros m’est venue quand mes parents m’ont emmené en vacances dans les Landes. Nous avions pour habitude d’observer et de découvrir chaque tradition de chacun des endroits visités. La course landaise était une chose que je voulais connaitre et voir de mes propres yeux. J’avais à peine 5 ans mais l’ambiance, l’esprit, le cadre m’a directement plongé dans un rêve. La tête pleine d’étoiles nous sommes rentrés à Oyonnax. Je me suis empressé de parler de ma découverte à ma grand-mère. Elle m’a montré l’ouverture de l’opéra Carmen dans laquelle il y a une scène de corrida. Mon amour pour la tauromachie est né ce jour. De mes cinq ans à mes treize-quatorze ans j’ai été rongé par l’envie d’approcher mon rêve. Un petit mec d’Oyonnax qui aime les toros, mais pas le rugby, quel étrange personnage. Je passais un peu pour un malade. A mes quatorze ans, j’ai trouvé une école taurine sur internet et elle nous a acceptés à bras ouvert. Au début mes parents et moi faisions les allers-retours Oyonnax-Nîmes pour aller aux entrainements du samedi. Nous nous sommes vite rendu compte que cela ne suffirai pas et que financièrement c’était impossible. Alors j’ai quitté ma région. Mes parents m’ont inscrit à l’internat et j’avais ma famille d’accueil pour les week-ends. Merci à eux car sans cette générosité rien n’aurait été possible. J’ai donc réussi à me rapprocher de ma passion et la vivre à 100%.
Que retenez-vous de votre carrière de novillero sans picador ?
Ma carrière de novillero sans picador fut très riche. Grâce à l’aide reçue du Matador de Toros retiré Gilles Raoux, j’ai participé à une soixantaine de spectacles. Je suis passé dans de grandes arènes comme Séville, Barcelone, Dax, Mont de Marsan, Nîmes, Arles, Grenade. La date qui m’a le plus marqué est Séville. Faire le paseo et toréer dans ces arènes mythiques c’était juste incroyable, ce fut une grande chance. Et j’en profite pour remercier la commission taurine de Mont de Marsan et son Président Guillaume François qui m’a permis de réaliser ce rêve.
Pourquoi avoir fait le choix de tout arrêter en fin d’année 2011 ?
La décision de me retirer en fin de saison 2011 à été plus que difficile. Tirer un trait sur une passion n’est évident pour personne et cela doit être respecté. Je l’ai fait car je ne me reconnaissais plus, j’étais fatigué de tout ça et je n’avais pas envie de me mentir et surtout pas au public. Il était plus que nécessaire pour moi de me retirer, prendre du recul et recharger les batteries.
Durant votre pause, avez-vous coupé contact avec le monde taurin ou êtes vous resté en contact avec le toro ?
Non, pendant deux ans j’ai complètement coupé les ponts avec ce milieu. Il m’était impossible d’aller voir une corrida, un tentadero et la simple discussion taurine pouvait me rendre nerveux. Petit à petit je suis retourné aux arènes, au campo et j’ai renoué des liens avec le monde taurin.
Quels sont aujourd’hui les raisons de votre retour dans les ruedos ? Avez-vous changé depuis ces quatre années ?
Cela fait déjà quelques temps que je me pose des questions. Le contact avec le toro me manquait horriblement. Début juin 2015 j’ai lancé l’idée de m’offrir un novillo pour mon anniversaire par simple passion. Ce jour s’est tellement bien passé (novillo extraordinaire de Roland Durand, la présence des personnes que j’aime…) que l’envie devenait de plus en plus forte. En toréant ce novillo je me suis senti libre, relâché, épanoui…j’avais l’impression de revivre. J’en ai donc parlé à mon entourage et j’ai décidé de revenir. Ma vie a totalement changée, j’ai grandi, muri, je me suis endurci et j’ai la chance d’être très bien entouré. Le fait de pouvoir faire confiance, se confier fait toute la différence. Ces quatre années m’ont été nécessaire pour me retrouver et comprendre que cette passion est toute ma vie.
Que vous a apporté votre ancien mentor Gilles Raoux ? C’est avec lui que vous allez prendre un nouveau départ ?
Gilles m’a énormément apporté tant sur le plan humain que taurin. C’est une personne très généreuse prête à se sacrifier pour aider les autres. Grâce à lui j’ai toréé en France, en Espagne et au Portugal. Je lui dois beaucoup. J’ai en effet demandé à Gilles de m’accompagner pour mon retour, ce qu’il a accepté, je le remercie infiniment.
Aujourd’hui il n’y a pas beaucoup de novillero français en novillada piqué (on en comptait quatre l’année dernière). Est-ce la preuve que les arènes française oublient un peu la jeunesse française ?
Oublier la jeunesse française je ne pense pas. On voit des actions fleurir en faveur des jeunes dans de nombreuses arènes. Il est vrai également que le nombre de novillades a diminué ces dernières années mais il en existe encore. Et c’est positif. Pour les novilleros avec picadors en France, c’est vrai qu’il y en avait que quatre l’an dernier. Pour 2016, il va y en avoir deux ou trois de plus avec la présentation de certains et le retour d’un autre…Cela va créer une saine compétition et susciter, je l’espère, de l’intérêt auprès des aficionados et des empresas. Voyant cela, voyant cette émulation qui va se créer entre nous, j’espère que les organisateurs nous donneront l’opportunité de toréer et que le nombre de novillades augmentera.
Avez-vous déjà été contacté pour la temporada 2016 ?
Pour le moment je ne peux pas en parler…des contacts ont en effet été pris et sont en cours de négociation.
Une nouvelle association vient de voir le jour, Camino a Matador, son bureau a decidé de vous venir en aide pour votre retour dans les ruedos. Qu'est ce que cela va vous apporter ? Etes-vous "heureux" qu'une association décide de vous aider quelques semaines après votre annonce de revenir dans le ruedo ?
Bien sur que je suis heureux et heureusement que des associations comme celle la existent ! Elle a été créée dans le but d'aider un jeune humainement, techniquement et financièrement, quoi de plus beau ? Je remercie les personnes qui gèrent l'association et qui me donner un coup de main au risque d'être incomprises et critiquées ! Ils vont énormément m'apporter sur le plan humain et financier ce qui me permettra de me préparer. Ce qui est également positif c'est qu'avec moi, ils vont aider d'autres jeunes en leur permettant de m'accompagner chaque fois que je pourrais toréer ou tuer des toros en privé.
Merci Mateo Julian pour cet entretien, on espère vous retrouvez dès le début de la temporada dans les arènes.
Propos reccueillis par : Jean Dos Santos